La fête et la gastronomie
Ces deux notions sont tellement proches en nous que l´on pourrait presque paraphraser l´adage populaire « dis-moi ce que tu fêtes et je te dirai ce que tu manges ». Le maïs est très important pour la préparation de nombreux plats comme le tamal, le mote pata, le mote pillo et des boissons comme la chicha, le rosero et le morocho.
Décembre est le mois idéal pour venir à Cuenca. Le 24, toutes les couleurs de la religiosité populaire et le néobaroque brillent encore plus avec le Passage de l´Enfant, ses réminiscences solaires étant surlignées par le rituel de la chicha offerte aux priostes (personnes qui parrainent social et économiquement l´événement et sont choisies chaque année) et aux assistants, en plus du pain traditionnel de Noël.
Pour Noël et le Nouvel An il y a la dinde, présence internationale dans notre nourriture, les tamales et les buñuelos faits à base de farine de maïs. Délicieux !
Le tamal cuencanais est fait avec une pâte de farine de maïs légèrement cuite, farcie de viande de porc, d´œufs durs et de raisins secs, enveloppée dans des feuilles de balisier et cuite à la vapeur. Un régal pour les papilles !
Les familles gardent de vieilles recettes de buñuelo, mais sa base est la dose exacte de farine de maïs précuite avec de l´anis, à laquelle on rajoute des œufs et du lait, en fouettant à la main jusqu´à épuisement. Les portions de pâte crémeuse se font frire et dorer dans de la graisse de porc. Elles sont servies avec du miel, à savourer sans modération !
Même si c´est une fête mobile, en février on célèbre le Carnaval. On danse, mange et boit en abondance. En suivant de vieilles traditions, espagnoles et locales, les gens se jettent de l’eau les uns aux autres, sans restriction. C´est la fête de l´eau !
Le mote-pata, qui domine la table, est peut-être le roi des plats typiques cuencanais : une épaisse soupe de maïs pelé, du bouillon de viande de porc et des morceaux de cette même viande, de saucisse et de lard. Assaisonné avec des graines de sambo (une citrouille traditionnelle), grillée, moulue et préparée dans un mélange d´oignons et de lait.
Mars ou avril commémorent la Semaine Sainte. Les processions du Dimanche de Rameaux ont des traits peu écologiques, mais pittoresques : les fidèles amènent, pour les bénir, des palmes tissées, certaines d´entre elles sont de vraies œuvres d´art populaire. Elles viennent des régions au climat chaud de la province de l´Azuay, dont la capitale est Cuenca.
C´est l´heure de la fanesca, un autre plat pantagruélique. Selon la tradition et en mémoire du nombre d´apôtres, on utilise douze ingrédients pour sa préparation : petits pois, fève pelée, maïs, haricot ; trois sortes de citrouille : courgette, limeño et sambo ; riz, lentilles, achocha, pommes de terre, chou. On cuisine tout cela séparément et on le mélange et assaisonne à la cuencanaise, dans du lait où l´on a cuit du poisson sec, servi ensuite dans une sauce dorée ou d´escabèche. Les chumales ou humitas sont le complément du grand plat central : faits avec du maïs tendre moulu et assaisonnés avec de l´œuf battu, du beurre et éventuellement du fromage, ils sont cuits à la vapeur dans les feuilles qui enveloppent l´épi de maïs. On finit le festin par le gâteau noir du Jeudi Saint, une des recettes les plus anciennes qui viendrait de l´époque coloniale, fait à base de farine de riz, panela et beurre.
Juin est le mois du Corpus et du Septénaire, avec des processions et des cérémonies qui rendent hommage au Saint Sacrément : sept nuits remplies de ballons, de fusées, de châteaux et de tout le répertoire des feux d´artifice populaires, et sept jours de sucreries, fruit de la pâtisserie traditionnelle, disposées sur des tables colorées tout au long du mur sud de la nouvelle cathédrale et autour du Parc Calderón. Un banquet pas seulement pour le goût mais aussi pour la vue. Il y a les arepas (galettes) de maïs de différentes variétés, les anisadas, les quesadillas, les couronnes confites et avec du jaune d´œuf, les alfajores, les panes de viento, les pernilitos de patate douce et de fruits de la passion, les cocadas, les œufs de poche, les petits fromages de manjar de leche et hostie, les boules de coco, les petites oranges de carotte, les petites pommes de pain doux, lait, cannelle et jaune d´œufs, les petites poires d´ananas, les petites mûres de betterave, ornées de papiers découpés qui simulent des tiges. Que des noms mystérieux donnent envie !
De juillet à septembre, la ville est calme à cause des vacances, sans l´agitation quotidienne d´un peuple qui se caractérise par sa vocation au travail. On peut davantage profiter des beautés de Cuenca et de sa nourriture : la truite de ses rivières en hauteur, préparée et servie de différentes façons dans des lieux pittoresques sur le chemin du Cajas ; les célèbres viandes sèches grillées, servies avec du mote pillo (maïs cuisiné et mélangé avec de l´œuf, de l´oignon et du fromage) et des fèves, préparées sur le chemin de San Joaquín (paroisse rurale à quelques kilomètres du centre-ville, berceau des tisseurs habiles de paniers) ; la viande de porc en sancochos, chicharrones et fritada (le nom dépend du degré de cuisson), les llapingachos (croquettes de pomme de terre) et les morcillas à Sertag, sur le chemin de Gualaceo, les cuys grillés, servis avec des pommes de terre dorées, le porc avec sa cascarita (la peau) croustillante offert dans de nombreux restaurants populaires le long de l´avenue Don Bosco ; les empanadas de Baños, lieu avec des thermes à seulement 8 kilomètres du centre, ou les tortillas de farine de maïs et de blé, qui cuisent dans des pots dans le marché de Gualaceo, servies avec le dulce morocho (boisson chaude à base de maïs cuit, sucre et cannelle) ou le rosero (boisson froide de maïs, sucre et fruits).
En novembre, on fête l´indépendance de la province avec des défilés, des ferias artisanales, des représentations artistiques, des bals populaires et l´élection de reines, de la même façon que l´on commémore en avril la fondation espagnole. Dates antagoniques, historiquement parlant, on les aligne sur les festivités et on les solennise à n´importe quel moment par des grands repas, avec certains des mets qui ont déjà été décrits, ou avec une nourriture internationale variée, dans un des nombreux restaurants cuencanais de différentes catégories.
Début décembre, une nouvelle date commémorative ferme ce circuit de fête et de gastronomie à Cuenca : le 1er décembre 1999, la ville fut désignée comme Patrimoine Culturel de l´Humanité et inscrite dans la liste des Biens Patrimoniaux de l´Humanité le 4 décembre de la même année, pour ses valeurs architecturales, traditionnelles, humaines et artistiques.
Des événements culturels, des feux d´artifice, de la musique et de magnifiques ferias de nourriture criolla font briller cette commémoration.
Comme vous pouvez le constater, toutes les périodes sont bonnes pour venir dans cette petite ville où il fait bon vivre, entourée de montagnes basses qui exposent toutes les tonalités de la couleur verte. Ville fondée en 1557 par les espagnols, dans un lieu qui avait été occupé depuis très longtemps par des peuples de la région et qui deviendrait à l´époque de l´Inkario une des capitales du Tawantinsuyu sous le nom de Tomebamba, une des quatre rivières qui la traversent et l´embellissent.
